Chevauchant paisiblement derrière le prêtre et son fils, le jeune homme, de nouveau évadé, ne savourait qu'à moitié sa liberté une seconde fois retrouvée. En traversant la ville, de la prison jusqu'à l'extérieur, il avait gardé les yeux fixés sur la route entre les oreilles de son cheval, ne jetant regard ni par la gauche, ni par la droite. Il craignait trop d'entrapercevoir un visage connu. Et parmis eux, peut-être, ceux qui avaenit été ses parents.
Il ferma les yeux et secoua la tête, se remit à fixer la route.
Quand ils eurent passé les portes de la ville, sans la moindre difficultée, la présence du père d'Aymeric parmi eux leur garentissant le passage, Jök commença à lever le nez. Et sous la lumière naissante du jour, il redécouvrait avec ravissement l'extérieur, savourant la fraîcheur de l'air et, bien que faible, la douce chaleur du soleil. Tout lui semblait harmonieux, et, souriant, il en oublia à quel point son sourire jurait avec le paysage. En brisait l'harmonie, comme lui-même brisait celle si bien orchestrée par les fils des créateurs.
Il en aurait presque oublié qu'il n'était pas seul, qu'il s'évadait. Il ne pensait qu'à ce qui l'entourait, et à ce qui l'attendait. Si avant il avait toujours eut l'impression de vivre un cauchemar, il effleurait maintenant le rêve du bout des doigts. Il ne fuyait pas, traqué par les prêtres comme une bête sauvage. Non, il venait de quitter sa ville natale à cheval, presque la tête haute, et en tout cas le coeur léger.
Seulement d'un seul coup, il tira avec force sur les rênes et se retourna en selle, une main sur la croupe de sa monture. Ses yeux glauques et pourtant pétillant d'un retour en vie effleurèrent Nébulia, la prison, la fixant avec intensité. Comme si il voulait en traverser les murs. Il se souvint d'un matin, quatre ans de cela, où il avait eut sous les yeux le même paysage, le même décor. Et pour un bref instant il eut l'impression, non pas de quitter la ville, mais de revivre ce souvenir. Et de revenir à Nébulia, pour rester quatre ans en prison.
Le jeune homme soupira. Entre ces murs qu'il quittait, il le savait, d'autres comme lui attendaient cette liberté. D'autres vivaient la même chose qu'il avait vécu, avec ces mêmes convictions qui lui avaient permit de rester vivant. La conviction qu'un jour, ils seraient de nouveau libre. Jök se promit de revenir chercher ces compagnons de misère, auxquels il n'avait pourtant jamais parlé. Ils n'avaient partagé que les salles de tortures, les outils brûlant et tranchant, les bourreaux. Ils avaient eut les mêmes hurlements de rage et de douleur, la même envie de pleurer. Et la même fierté qui les en empêchait. Une larme glissa sur sa joue d'humain, sur sa mâchoire d'acier, s'écrasa sur sa main pour se perdre dans le pelage du cheval.
Ils n'avaient jamais échangé un mot. Pourtant il reviendrait les chercher. Et il jura dans son coeur de ne pas abandonner, de continuer de se battre pour eux. Et de les sauver, eux, comme Aymeric et son père l'avaient sauvé. Et son regard exprima la promesse qu'il leur faisait. A eux. Aux autres.
Il lança sa monture au galop pour rejoindre ses compagnons, puis passa au trot, muré dans un silence léger et délicat. Un silence bien différent de celui qui l'avait habité pendant quatre ans, dans la noirceur crâsse de sa cellule, attendant Malaël pour souffrir, et Nel pour être libre.
[on continu à l'océan?]
Mar 5 Fév 2008 - 23:21
